Ministre, député, hiérarchie et populo

Un ministre ontarien et un député libéral du Québec sont allés en voyage en plein pic de la pandémie. On en a beaucoup parlé…mais pas assez.

Nous avons surtout entendu des critiques basées sur l’exemplarité : un politique doit donner l’exemple et faire ce qu’il nous implore de faire.

Sur l’injustice : pourquoi lui et pas nous ? Et chacun de dire que le ministre lui aussi respecte les règles, emporte une provision de masques et va respecter une quarantaine stricte au retour.

Nous n’avons entendu personne sur la pire conséquence des voyages de ces ignares volontaires : la contagion.

Beaucoup de citoyens invoque ce fameux respect des règles comme une défense imparable. Certains nous disent qu’enârtant, ils évitent de participer à l’épidémie locale ! On n’entend jamais une critique qui pour démonter ce qui leur apparait comme une évidence. Sauf peut-être à demi-mot par l’ensemble des spécialistes qui martèlent qu’il faut réduire les interactions entre les personnes, réduire les contacts. En termes clairs, réduire les contacts signifie que, quelles que soient les mesures prises, il faut réduire les contacts, quand même, et que c’est cela qui éteint une pandémie. Plusieurs pays l’ont démontré.

Les causes des infections ne se réduisent pas aux mauvais comportements des jeunes, des fêtards, des voyageurs compulsifs et des sportifs d’intérieur. Les comportements à risques participent aux contaminations, mais pas à toutes les contaminations.

Dans les hôpitaux, nombre de soignants ont été contaminés en prenant toutes les mesures que les meilleurs citoyens prennent et même au-delà puisque ces soignants étaient équipés de masques N95 ou FFP2 qui filtrent 95 % des virus en plus de se couvrir de blouses. Une étude récente confirme que le masque à lui seul n’est pas suffisant surtout quand le masque est un masque de procédure ou un couvre-visage.

Il faut enfin comprendre que les études sur les contaminations ne se font pas en mettant en présence des contaminateurs et des cobayes qui portent des masques à peu près bien installés et changés après quatre heures d’usage, mais en laboratoire, avec des appareils qui soufflent des bactéries au travers d’un morceau de masque. Les résultats ainsi obtenus ne reflètent jamais la réalité, les masques sont assez efficaces et on ne regarder pas où vont les quelques bactéries qui passent au travers. D’où, probablement, ce fameux 95 % de protection qui laisse 5% de doute.

Alors, pourquoi ?

Une pandémie, une infection virale ne répond pas à une logique individuelle, mais à une logique statistique, une logique collective, une logique de société. Si un million de citoyens prenaient l’avion pour se rendre au Mexique pendant une semaine, statistiquement, mécaniquement disent les Français, 1 % d’entre eux pourraient être contaminés. Parmi ces contaminations, quelques-unes seraient survenues à cause de masques défectueux, ou de moindre qualité. Les masques en tissus, par exemple, ne rivalisent pas avec les masques N95. D’autres seraient infectées pour bien d’autres raisons : par un supercontaminateur mangeant à la même table, donc sans masque, ou à cause d’une sensibilité plus grande dans le cas d’une exposition jugée non dangereuse. Ou parce que dans un avion (on a vu un cas avec Air Canada), ou un restaurant, un agent de bord avait négligé d’obliger un voyageur à remettre son masque sur le nez. Les raisons évoquées ici sont les mêmes  que nous retrouvons au sein de nos villes qui causent les contaminations communautaires – en plus des infections causées par les citoyens qui défient ouvertement les règles. Il faut enfin ajouter que l’origine des contaminations n’est fiable qu’à 60 % selon des chercheurs. Il est difficile de déterminer le lieu et la personne exacte de la contamination.

Il n’y a en effet pas de milieu stérile, où aucun virus SARS Covid-2 ne circule. Dans un avion, dans un aéroport, à la douane, à la réception des bagages, au bar, au magasin, dans les taxis ou les autobus, au restaurant, dans un ascenseur, il est probable qu’une certaine quantité de virus soit présente. Et si un million de personnes circulent dans de tels environnements, un certain nombre vont être infectées. Si toutes les mesures sont respectées, le nombre d’infections sera évidemment diminué, mais ne sera pas nul.

Ce principe s’applique à toutes les interactions, sports, restaurants, théâtres. C’est selon ce même principe que l’on ferme ces institutions, non pas parce qu’elles ne respectent pas les règles, mais parce qu’elles multiplient les contacts qui étendent la période durant laquelle nous allons souffrir de cette pandémie. Non seulement écrasons nos économies, mais nous conservons le virus en le laissant circuler, nous créons des terrains favorisant des mutations et des transmissions à d’autres espèces animales.

A propos alaincognard

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Un commentaire pour Ministre, député, hiérarchie et populo

  1. Christiane Cadieux dit :

    Merci Alain pour tes articles, ils sont toujours aussi percutants…

    J’espère que tu vas bien!

    Ces quelques mots aussi pour te souhaiter une bonne année 2021.

    Christiane 😘😘

    Envoyé de mon iPhone

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