Les Québécois ne se souviennent même pas de leur devise « Je me souviens ». Moins d’un an après le tsunami des grandes fraudes municipales qui a frappé la province, les deux supermaires réclament pour leur ville les pouvoirs d’une nation. Ils sautent d’ailleurs allègrement par-dessus les concepts de nation, pays, peuple et de constitution pour se poser en dictateur d‘une ville-état. Ils ne deviendront pas pansus à penser.
Les deux maires, ils le répètent, ne s’embarrassent pas de grandes idées théoriques. Coderre, il n’y a pas six mois, disait qu’une ville n’était pas une entité politique, seulement une administration. Administrer, c’est évidemment une gestion qui n‘exige pas trop de démocratie, tandis que diriger demande des échanges beaucoup plus élaborés avec le populo, et cela, le maire n’en voulait pas. Une fois couronné…
Quand les maires ont donné leurs nombreuses crises de presse, ils ont utilisé tous les tremplins : auprès des regroupements de municipalités, comme supercouple médiatique, ou encore, maires de villes exceptionnelles. Ils sont à la fois maires, présidents, administrateurs et de toute façon, seuls et premiers. Ils ne se disent plus maintenant maires ni gérants, mais « représentants » de la population.
Les Montréalais et surtout les Québécois ne sont pas insensibles à cette méthode à la Poutine qui consiste à redonner de la fierté aux électeurs. Et comme en Russie, le stratagème aide à oublier le passé le plus récent : la corruption généralisée jusqu’aux plus hauts niveaux, les 17 millions payés pour annuler le contrat des compteurs d’eau, les morts des viaducs. Imaginez ce qui aurait pu se passer si Montréal avait eu ce qu’ils réclament, les pouvoirs d’un gouvernement ! Froid dans le dos…Aurions-nous oublié les quasi faillites de New York, Detroit ?
Accorder plus de pouvoirs à une partie d’un ensemble, d’un pays, ne peut se faire sans une réflexion profonde, ni sans changer radicalement les institutions. Le système politique municipal, qui déjà ressortit plus du vaudeville que de la bonne gestion (voir Toronto, Laval, Montréal….) permettrait tous les abus s’il n’existait un système (apparemment encore trop faible) de contrôle. Le maire Drapeau n’a pas eu besoin des pouvoirs que réclament nos Laurel et Hardy municipaux. Sous le même régime, a pu faire le métro, l’expo et le stade olympique…et il a fallu tout de même l’arrêter.