Pandémie et ambition politique

La France restera un cas d’école. Dès le début de l’épidémie, le président Macron et la plupart des économistes se sont engagés dans une course (folle dirions-nous) contre la croissance des contaminations, course perdue comme celle du lièvre de La Fontaine.

En Chine, pays de près d’un milliard et demi d’habitants, attendre un pic naturel c’est-à-dire une population suffisamment infectée pour que le nombre de nouveaux cas commence à diminuer était une politique de lemming. Il fallait plutôt stopper l’épidémie. L’Europe et les autres retardataires ont fini par adopter une idéologie de fatalité. Certains spécialistes européens, rejoints par Madame Merkel, ont dit que 60 à 65 % de la population européenne pourrait être atteinte selon un tel scénario attentiste.

On a pensé, en Europe et aux États-Unis, que l’on devait retarder la propagation du virus, étaler la contamination en laissant croire qu’on le pouvait. La raison était de permettre au système local de santé d’accueillir les personnes infectées avec les moyens du bord, en fuyant la nécessité de rouvrir les lits fermés durant les années précédentes ou de décréter un confinement « que les citoyens libres ne pourraient accepter ». En France, ces moyens consistent en 4500 lits de réanimation. Jusqu’à maintenant, c’était suffisant et la situation permettait à l’économie de « tourner » selon l’expression du président et des économistes.

Mais pour combien de temps ? Pendant que l’économie « tournait » au ralenti bien que plus rapidement que l’économie de Wuhan, le taux de nouvelles contaminations commençait à augmenter trop vite pour éviter à court terme la submersion des hôpitaux.

Au début de l’épidémie, chaque jour pouvait amener 25 ou 30 % de nouveaux cas. Aujourd’hui, il s’agit de triplement en trois jours et, dans le monde de dizaines de milliers de nouveaux cas chaque jour.

Brusquement, après la Chine et la Corée qui avaient vu juste, l’Italie, puis la France viennent de décider de fermer écoles, bars, restaurants pour ne laisser ouverts que les commerces nécessaires à la survie des citoyens et aussi des marchés publics et pourquoi pas des librairies et d’autres lieux.

Outre la peur de se voir reprocher d’avoir éteint l’économie, des mobiles plus politiques sous-tendent l’action et l’inaction du gouvernement : les élections municipales. En France, les partis politiques nationaux figurent aussi au niveau municipal. Le parti au pouvoir, LREM en fait une fixation. Parfois plusieurs comme dans le cas de Cédric Villani et de l’ancienne ministre de la Santé, Agnès Buzyn quand le président rêve d’installer des satellites, des munitions.. Cette dernière remplace le candidat présidentiel qui avait dû abandonner la course après avoir envoyé des images de son système reproducteur à une amante. Quant à Villani, il a été exclu du parti présidentiel, mais il se pourrait que le président conserve de bonnes relations avec lui. Comme le Premier ministre candidat au Havre, il pourrait revenir au cœur du pouvoir en cas d’échec à la mairie de Paris.

Malgré la fermeture de tous les lieux publics, le premier tour des élections municipales a eu lieu. Mais, comme l’épidémie s’est aggravée, le deuxième tour a été reporté, et l’ensemble de l’épisode électoral sera revu par le pouvoir présidentiel. Il suffira d’invoquer le faible taux de participation. La réforme des retraites fera l’objet d’autres tractations.

La France a connu ce que l’on appelle « la comm », la proposition d’une idéologie qui laissait croire que l’on pouvait vaincre l’épidémie et préserver une activité économique plus forte que celle qui prévalait dans les sociétés confinées, en Chine et en Italie. On ne voit pas pourquoi ce rêve aurait pu se produire : il apparait évident que limiter rapidement les contaminations est la recette pour faire revivre l’économie. Organiser la contamination générale peut conduire à une catastrophe économique et humanitaire.

Pour justifier ces discours truffés de demi-vérités et de mauvaises intentions, le Premier ministre a tenu à dire que les Français n’avaient pas suivi les directives de confinement, des directives que le gouvernement n’avait évidemment jamais énoncées, prétendant plutôt qu’il fallait « faire tourner » l’économie et ne pas paniquer… les seules « barrières » – lavage des mains, distance d’un mètre entre les citoyens – étant suffisantes. Tous les membres du gouvernement se sont vantés « d’écouter la science », reprenant ainsi le mantra de Greta, mais sans jamais donner la parole aux scientifiques. L’un de ces scientifiques a même pu dire que le fameux conseil scientifique n’a existé que bien après que le président ne lui attribue ses décisions! Ceux qui s’expriment s’offusquent de l’incohérence des décisions, du manque de moyens (le gel hydroalcoolique coule dans les bureaux de vote quand eux-mêmes en manquent), mais ils le font bien timidement. On a tendance, ici, à respecter la hiérarchie.

Rien ne dit, pour l’instant que la Chine et la Corée ont mis fin à l’épidémie. Un pic a été atteint et le nombre de nouveaux cas diminue, comme d’ailleurs dans la ville italienne de Codogno qui a enregistré une baisse des nouveaux cas. Personne n’est en mesure de dire ce que la pandémie deviendra. Des foyers retardataires (Inde, Afrique, Russie) pourraient recontaminer d’autres pays bien après la fin de l’épidémie. Mais l’expérience nous apprend déjà qu’une action rapide, concertée fonctionne. Et que dans l’urgence, il faut montrer un peu de décence et de maturité politique.

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